Les seigneurs et leurs vassaux sont généralement des chevaliers. Après avoir reçu une éducation de guerrier, le jeune homme, vers l'âge de 18 ans, devient chevalier lors de l'adoubement. En temps de paix ou en hiver, le chevalier part à la chasse à courre ou au faucon, s'entraîne et participe à des tournois. Comment ces hommes sont-ils devenus des spécialistes de la guerre ?
1. La guerre
a) Un nouvel art de la guerre
• À l'époque féodale, seuls le châtelain et ses vassaux combattent, alors que sous Charlemagne, tous les hommes libres faisaient la guerre. La façon de se battre a évolué durant le Moyen Âge. Jusqu'au xe siècle, les hommes combattent à pied. Au xie siècle, les fantassins ont disparu, remplacés par les chevaliers, qui se battent à cheval.
• Les chevaux, mieux nourris, sont devenus plus robustes. Leurs sabots sont ferrés. Assis sur une selle relevée à l'avant et à l'arrière, les pieds calés dans des étriers, le cavalier est stable sur sa monture. Il peut porter un lourd armement : le haubert (la cotte de mailles), le heaume (un casque de métal) et l'écu (un grand bouclier de bois renforcé de plaques de fer). À cela s'ajoutent l'épée et la lance, avec laquelle chargent les cavaliers.
b) Une aristocratie militaire
Ces nouvelles façons de combattre entraînent des transformations économiques et sociales. Pour nourrir les chevaux de bataille, les destriers, les paysans cultivent l'avoine. Le fer des forgerons permet de fabriquer les armures. Surtout, la guerre devient une affaire de spécialistes. Pour porter et manier les armes, il faut s'entraîner dès l'enfance, sans relâche. Le chevalier ne travaille pas et consacre tout son temps à la guerre. De plus, son équipement coûte très cher. Seuls les plus riches propriétaires fonciers peuvent combattre à cheval : le chevalier est donc bien souvent un seigneur, ou un vassal qui possède un fief.
c) Les occupations des chevaliers
La chasse et les tournois constituent l'essentiel de l'entraînement. Dans les forêts, les chevaliers poursuivent le gros gibier qu'ils affrontent à la hache ou à l'épieu. Les accidents sont fréquents, parfois mortels. Les tournois, qui opposent des groupes de chevaliers, sont de véritables combats : on peut être blessé, mourir et obtenir des rançons. Enfin, les guerres ne manquent pas. Elles opposent le plus souvent deux seigneurs soutenus chacun par leur famille et leurs vassaux : ce sont des guerres privées.
d) Une réglementation religieuse
• L'Église, qui est l'une des premières victimes de la guerre, tente de lutter contre cette violence. Dès le xie siècle, elle soutient et organise des mouvements de paix : les chevaliers, réunis en assemblées, jurent de respecter la paix de Dieu et de ne plus s'attaquer aux gens sans armes, clercs, paysans, marchands et pèlerins.
• L'Église interdit ensuite de combattre du mercredi soir au lundi matin, en souvenir de la Passion et de la Résurrection du Christ : c'est la trêve de Dieu. Elle ne renonce cependant pas à changer le mode de vie des chevaliers : elle donne un caractère religieux à la cérémonie de l'adoubement, par laquelle l'écuyer devient chevalier. En fait, seules les croisades parviennent à détourner les ardeurs belliqueuses des guerriers.
2. L'esprit chevaleresque
a) La chevalerie
• Seuls guerriers, les chevaliers bénéficient d'importants privilèges (ils échappent aux impôts et aux servitudes). Ils forment une classe à part : la chevalerie. Pour y entrer, il est préférable d'être fils de chevalier (bien que le titre de chevalier ne soit en rien héréditaire). Dès l'âge de douze ans, le jeune homme vit dans la maison d'un seigneur. Il l'accompagne à la guerre, soigne son cheval, entretient ses armes, conduit ses chevaux de renfort, et porte son écu jusqu'au champ de bataille : il est son écuyer.
• Il devient à son tour chevalier au cours d'une cérémonie : l'adoubement. Après un bain purificateur, le jeune homme se recueille et jeûne toute la journée. La nuit est consacrée à la prière. Le lendemain, après avoir assisté à la messe, il communie et fait bénir son épée. Un seigneur lui remet alors ses armes puis frappe un grand coup sur l'épaule du nouveau chevalier pour éprouver sa vigueur : la colée, ou paumée.
b) L'idéal chevaleresque
• Les vertus des chevaliers reposent sur deux qualités essentielles : la prouesse et la grandeur d'âme. Courageux lorsqu'il combat et fidèle envers son seigneur, son roi ou sa dame, telle est l'image du preux chevalier. À partir du xiie siècle, sa prouesse est mise au service de l'amour : c'est la courtoisie (les romans courtois, chantés par des trouvères ou des troubadours, content les aventures d'un chevalier, par amour pour sa dame).
Fête et tournoi donnés en l'honneur de la reine Isabeau de BavièreLithographie de 1885 d'après une miniature du xive siècle. © J.-L. Charmet
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• Peu de règles empêchent ces guerriers de faire régner la loi du plus fort. Aussi, faute d'autorité royale pour imposer l'ordre, un idéal se forme dans l'esprit même des seigneurs, mettant un frein à la brutalité. Les familles seigneuriales sont étendues et solidaires : ce sont les lignages. Si l'un des membres est attaqué, tout le lignage prend les armes. Seigneurs et vassaux se doivent aussi fidélité, faute de quoi ils sont coupables de félonie (crime qui les met au ban de la société). La chevalerie tend à devenir un clan, qui se confond avec la noblesse.
c) Les ordres de chevalerie
• L'établissement des Francs en Terre sainte a suscité la création des premiers ordres de chevalerie, qui ont pour mission de protéger les pèlerins, organiser des services hospitaliers et défendre le royaume latin d'Orient. Ce sont les templiers et les chevaliers teutoniques.
• Lors de la guerre de Cent Ans, l'adoubement n'est plus nécessaire : les chevaliers ont désormais un lien personnel plus fort avec le prince ou le roi. De nouveaux ordres de chevalerie sont créés : l'Étoile, Saint-Michel, la Toison d'Or.