« Les drogues sont dangereuses pour la santé ». Cette phrase, tout à fait vraie au demeurant, vous l'avez certainement entendue des dizaines de fois. Mais vous êtes-vous déjà demandés quels sont exactement les mécanismes, physiques et psychologiques, engagés par la consommation de drogue ? Et celle-ci est-elle marginale ou relativement répandue ?
Voici quelques éclairages pour mieux comprendre l'action des drogues et leurs conséquences sur l'organisme.
Réalité et perception de la consommation
Malgré les campagnes de sensibilisation, la consommation de drogues, d'alcool et de tabac demeure à un niveau relativement élevé chez les jeunes Français, comme le montrent les chiffres de l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES).
En 2007, 88 % des jeunes de 16 ans ont déjà consommé de l'alcool dans leur vie. Un chiffre d'autant plus inquiétant que cette consommation est régulière pour 13 % des jeunes et que près d'un sur deux dit avoir déjà été ivre.
Côté tabac, 80 % des Français de 17-18 ans ont fumé au moins une fois dans leur vie.
Enfin, le cannabis est lui aussi très répandu chez les jeunes : 50 % des adolescents de 17 ans l'ont expérimenté au moins une fois. De plus, 15 % des garçons et 6 % des filles consomment du cannabis au moins dix fois par mois.
De telles habitudes comportent évidemment des risques, d'abord pour la santé : troubles respiratoires, élévation de la probabilité d'avoir un cancer du poumon, des problèmes cardiovasculaires, etc.
Mais les effets peuvent aussi être immédiats. En particulier, trop boire d'alcool peut entraîner un coma éthylique, une perte de connaissance loin d'être anodine puisqu'elle peut conduire à la mort si l'individu n'est pas pris en charge à temps.
D'autre part, conduire en ayant consommé de la drogue ou de l'alcool est particulièrement dangereux dans la mesure où cela diminue la vigilance, altère les réflexes et augmente la gravité des accidents. À lui seul, l'alcool entraîne 1 000 décès par an et est aujourd'hui la première cause de mortalité sur les routes.
Par ailleurs, les effets des drogues et de l'alcool sont également psychologiques, rappelle l'INPES : « son pouvoir désinhibant et la modification des comportements peuvent conduire à des rapports sexuels non protégés et/ou non prévus, exposant potentiellement les jeunes filles à des grossesses non désirées et les deux partenaires aux infections sexuellement transmissibles et au VIH ». Enfin, une consommation régulière peut créer une démotivation pour les études et une agressivité avec sa famille et ses amis.
Tous ces indicateurs semblent connus. Et pourtant, les consommateurs ne se rendent pas toujours réellement compte des risques qu'ils encourent : à 16 ans, seuls « 51 % des Français sont conscients du risque lié à la consommation de cinq verres ou plus chaque week-end », souligne l'INPES.
Cette faible perception du risque est liée à ce que les spécialistes appellent une « véritable attitude de déni », liée notamment au phénomène d'addiction (voir plus bas).
L'action des drogues sur le cerveau
Les drogues sont des psychotropes, ou substances psychoactives, c'est-à-dire qu'elles agissent sur le fonctionnement psychique des hommes dont elles peuvent modifier la perception, le comportement, l'activité mentale ou encore l'humeur, ce qui n'est évidemment pas sans danger pour celui qui les consomme, mais aussi pour son entourage.
L'action des drogues se focalise sur les neurotransmetteurs, ces substances secrétées par les neurones qui permettent la connexion (synapse) entre les dizaines de milliards de neurones présents dans notre cerveau : c'est cet influx nerveux qui assure la communication des informations.
Selon leur composition chimique, les drogues peuvent agir de trois manières différentes :
- Certaines, dont la structure moléculaire est proche de celle des neurotransmetteurs naturels, se substituent à eux et s'installent à leur place dans les récepteurs, brouillant ainsi le message envoyé.
- D'autres ont pour effet d'augmenter la sécrétion d'un neurotransmetteur. C'est le cas par exemple de la cocaïne qui augmente la présence de dopamine dans la synapse.
- Un dernier type d'action réside dans le blocage au contraire de la sécrétion d'un neurotransmetteur. Ainsi, l'alcool inhibe les récepteurs appelés NMDA, qui jouent un rôle majeur dans la transmission de l'influx nerveux.
On classe en général les drogues en trois catégories, en fonction de leurs effets sur le système nerveux :
- Les stimulants augmentent l'activité du cerveau et diminuent la sensation de fatigue et de sommeil. Il s'agit de substances comme la cocaïne et les amphétamines notamment, mais aussi, dans une moindre mesure, la caféine et la nicotine présente dans le tabac ont un effet excitant.
- À l'inverse, les dépresseurs diminuent l'activité du cerveau, ce qui peut donner un sentiment de calme, de relaxation, voire provoquer l'endormissement. L'individu est alors beaucoup moins conscient de ce qu'il fait et de ce qui l'entoure. L'opium, la morphine et l'héroïne font partie de cette catégorie de drogues.
- Les perturbateurs quant à eux sont des substances hallucinogènes, comme par exemple le cannabis et ses dérivés (haschich, marijuana, THC, etc.), le LSD, la mescaline, ou le PCP (phénylcyclidine), également appelé « poudre d'ange ». Les perturbateurs entraînent des altérations du fonctionnement du cerveau, en particulier de l'humeur, de la perception et des processus cognitifs comme la mémoire ou l'apprentissage.
Le cercle vicieux de l'addiction
« Je suis jeune et en bonne santé, je ne crains rien ! Et puis, je saurai m'arrêter quand il le faudra… » Ces phrases, on les entend couramment quand on parle de drogues et leurs auteurs sont généralement de bonne foi, intimement convaincus de ce qu'ils disent. Mais la réalité est loin d'être aussi simple.
Médecin spécialiste des addictions et directeur général de la Clinique Montevideo à Paris, William Lowenstein, détaille les trois paliers successifs liés à la consommation de drogues ou d'alcool : l'usage, l'abus et la dépendance.
© Clinique Montevideo
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« L'usage correspond à la phase où l'on consomme des substances en les appréciant sans qu'il y ait d'effet nocif : la relation à l'autre est facilitée, on dort mieux, on est plus optimiste… Et le lendemain, on ne ressent ni angoisse, ni gueule de bois, ni déprime ».
En revanche, on parle d'abus lorsque ces effets sont présents mais que l'on consomme tout de même : on sait que l'on prend un risque, mais on le fait malgré tout.
Quant à la dépendance, elle survient « quand on perd le contrôle de sa consommation, quand vouloir n'est plus pouvoir, et quand le savoir n'est plus un pouvoir », explique le Dr Lowenstein. Autrement dit, quand on veut mais qu'on ne peut pas s'arrêter, malgré le fait d'être conscient que ce n'est pas bon pour la santé.
Mais, il faut le savoir : nous sommes inégaux devant le phénomène d'addiction. Si la génétique entre ici en ligne de compte, nous avons également des périodes de plus ou moins grande vulnérabilité, en fonction des événements de la vie, mais aussi du stress.
Par ailleurs, « la puberté constitue une période particulièrement fragile, prévient le Dr Lowenstein, où le risque de devenir dépendant est beaucoup plus grand, en raison notamment du dynamisme des cellules cérébrales : si l'on place une petite bombe dans un train à grande vitesse, on a plus de risques de tout faire dérailler ! ».
Pour mieux comprendre ces phénomènes et l'action des psychotropes sur son propre organisme, il est ainsi important de se poser sans mentir des questions concrètes : que recherche-t-on en consommant telle ou telle substance ? Qu'a-t-on vraiment apprécié ? Et surtout, qu'a-t-on ressenti quelques heures après ou le lendemain ?
Classements et législation
Drogue douce / drogue dure : une réelle distinction ?
Il n'existe pas de définition scientifique permettant de classer les drogues en « douces » et « dures ». Toutes ont des effets toxiques et l'on ne peut pas dire que certaines soient moins dangereuses que d'autres, même si certaines substances sont licites. Et ce, d'autant plus que les législations ont évolué avec les années, et diffèrent encore aujourd'hui selon les pays.
Ainsi, la Hollande autorise la consommation de cannabis alors que la France classe le cannabis dans les stupéfiants dont l'usage, la culture, la détention ou la vente sont interdits.
Ce que dit la loi française
L'usage du cannabis, comme des autres stupéfiants, peut être puni d'une sanction pénale pouvant aller jusqu'à un an d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende.
Par ailleurs, vendre ou donner des produits stupéfiants à des amis, quelle que soit la quantité, est considéré comme du trafic, qui peut induire des peines allant jusqu'à 5 ans de prison et 75 000 euros d'amende. De même, cultiver ou fabriquer des stupéfiants, mais aussi en exporter ou en importer sont également assimilés à du trafic.
D'autre part, la conduite sous l'influence de stupéfiants est interdite : la peine maximum s'élève à 4 500 euros d'amende et 2 ans de prison. Pour la conduite en état d'ivresse (au-delà de 0,5g d'alcool par litre dans le sang), la sanction grimpe à 9 000 euros et 3 ans de prison.