Au xive siècle, l'Europe connaît des difficultés économiques aggravées par des catastrophes naturelles. Les famines réapparaissent et la peste frappe durement des populations affaiblies. Tout l'Occident est touché, des campagnes aux villes, des paysans aux seigneurs. Comment ces crises se manifestent-elles ?
1. Les crises du xive siècle
a) La famine
Jusqu'au milieu du xiiie siècle, les campagnes d'Occident parviennent, bon an mal an, à nourrir leur population. Mais cette dernière ne cesse d'augmenter : les terres sont bientôt surpeuplées. Le climat devient plus irrégulier et plus froid, ce qui provoque une succession de mauvaises récoltes. À partir de 1315, la famine réapparaît.
b) La peste
• Sur cette population mal nourrie et affaiblie s'abat alors une terrible épidémie de peste, maladie mortelle. Venue d'Orient, la peste gagne l'Italie en novembre 1347 et se propage dans toute l'Europe. En deux ans, entre le tiers et la moitié de la population disparaît. Cette première épidémie est connue sous le nom de Peste noire ou de Grande Peste.
• Elle est suivie de nombreuses autres qui se manifestent tous les huit, dix ou quinze ans, jusque dans les années 1500. La peste touche en priorité les plus faibles : enfants, pauvres et vieillards. Vers 1420, la population européenne a atteint son niveau le plus bas. Elle ne recommence à croître qu'à partir de 1450.
c) Les guerres
À la même époque, les guerres provoquent également des ravages dans presque tous les pays européens. Si les batailles font relativement peu de victimes, elles mettent à feu et à sac les villages (qui doivent supporter pillages ou destructions). Les habitants fuient lors des opérations militaires ou lors de l'arrivée des Grandes Compagnies. Certains, n'ayant alors comme ressource que la mendicité ou le brigandage, deviennent des vagabonds.
2. Un malaise général
a) La misère des campagnes
• Les campagnes sont durement touchées par les crises. Les victimes de la peste et des guerres y sont nombreuses. Beaucoup de paysans se réfugient en ville.
• Le nombre de leurs sujets diminuant, les seigneurs perçoivent moins de redevances. Tout au long des xive et xve siècles, le prix des denrées agricoles ne cesse de diminuer, la valeur de la terre baisse. Les seigneurs essaient de limiter l'étendue de leur réserve et introduisent un nouveau système d'exploitation : le fermage. Surtout, ils complètent leurs revenus en faisant la guerre ou en se mettant au service du roi.
• Les paysans, quant à eux, supportent mal la pression de plus en plus lourde des redevances seigneuriales et des impôts royaux : les vilains se révoltent violemment. Les troubles les plus graves se produisent en Flandre de 1323 à 1328, dans le nord et l'est du Bassin parisien où éclate la Jacquerie en 1358, dans le sud de l'Angleterre en 1381. Ces soulèvements restent sans résultat.
b) Les difficultés des villes
• Les villes, moins touchées que les campagnes, connaissent pourtant de graves difficultés. Le commerce décline, les faillites et le chômage apparaissent. En Méditerranée, par exemple, les échanges avec l'Orient se réduisent à la fin du xive siècle ; la prospérité des villes italiennes s'en ressent.
• Certains se révoltent, notamment les compagnons (l'accès à la maîtrise leur est fermé : les patrons la réservent ainsi aux membres de leurs familles). Pour se défendre, ils s'associent au sein de confréries et organisent des grèves et des révoltes armées. Les plus importantes sont celles des compagnons du textile, à Florence en 1378 et en Flandre de 1379 à 1382. Ces mouvements sont écrasés par les seigneurs et la bourgeoisie commerçante.
c) Une crise morale
• Dans cette société troublée, nul n'est à l'abri du malheur ou de la pauvreté. Les esprits sont désorientés.
• Se sentant menacés, les hommes cherchent à profiter le plus possible des joies de l'existence : les fêtes et les divertissements se multiplient. Dans le même temps, les chrétiens se dégagent de plus en plus de l'influence du clergé. La magie, la superstition connaissent de grands succès tandis que des mouvements populaires, comme celui des flagellants, parcourent l'Occident, invitant les foules à faire pénitence. D'autres vont plus loin et remettent en cause les croyances religieuses : John Wycliffe en Angleterre et Jean Hus en Bohême (Europe centrale) sont condamnés pour hérésie.
• Les autorités connaissent également une crise profonde. La papauté, installée à Avignon de 1305 à 1377, est violemment critiquée pour sa richesse et le luxe de sa cour, alors que pèsent de plus en plus lourd les impôts d'Église. Enfin, plus grave encore, la chrétienté s'est scindée, autour de deux puis trois papes rivaux : c'est le grand schisme d'Occident.