Une résonance moyenâgeuse
À peine surprenant, cette coutume estudiantine nous vient d'un lointain passé… médiéval. Elle fut remise au goût du jour, au début du xixe siècle par des élèves de Polytechnique. À cette époque, les têtes pensantes parlent de « bahutage ». Plus de 200 ans plus tard, en dépit d'efforts répétés des gouvernements successifs, la tradition persiste, s'aggrave, évolue, s'adapte et se transmet auprès de nombreux étudiants. La bête noire pour tous les spécialistes, aujourd'hui, est le célèbre week-end d'intégration. Les bureaux des élèves (BDE) présentent ces « wei », prononcez « ouaille », comme le seul moyen pour la bleuzaille de se faire des amis. « Lorsque l'on a 19-20 ans, la pression est terrible explique Jean-Claude Delarue, Président fondateur de SOS bizutage. Si tu ne viens pas, tu seras tout seul pendant toute la durée de tes études ».
Le marché est vite conclu. En dépit des risques qu'ils encourent, beaucoup de nouveaux se laissent convaincre et acceptent de passer deux ou trois jours dans un lieu « surprise », comme le stipulent les « flyers » estudiantins, généralement très éloigné et très isolé – hors saison –. L'alcool y coule à flots et la pression du groupe amène chaque nouvelle recrue à obéir aveuglément aux ordres de leurs antiques aînés. Le décor est planté, tout devient possible, le sempiternel rapport de force dominant/dominé fait loi, dans la soumission la plus totale. S'ensuit alors une poignée de jeux douteux allant des gentilles petites humiliations aux dérapages les plus sordides que la presse relate chaque année.