La décision
• Première action : sur le fondement d'une faute de surveillance devant les tribunaux judiciaires
Le décret n° 90-788 relatif à l'organisation et au fonctionnement des écoles élémentaires édicte dans son article 2 que « la surveillance des élèves durant les heures d'activités scolaires doit être continue et leur sécurité constamment assurée en tenant compte de l'état, de la distribution des locaux, du matériel scolaire et de la nature des activités proposées ». L'accueil des élèves est assuré dix minutes avant l'entrée en classe et la surveillance à l'accueil et à la sortie des classes ainsi que pendant les récréations est répartie entre les maîtres.
Il n'est pas contesté ici qu'au moment de l'accident, deux enseignants assuraient la surveillance dans la cour de récréation et étaient bien positionnés, non loin de l'enfant. Il est, par ailleurs, incontestable que la cause directe de l'accident est, non pas le simple jeu de l'enfant avec sa balle, mais le jeu particulier consistant à envoyer la balle en l'air pour la rattraper avec la bouche. Or, aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que l'enfant a joué plusieurs fois de cette façon-là avant l'accident.
Au contraire, il résulte de la déclaration d'un autre enfant, que le jeune élève, s'il avait antérieurement joué avec sa balle, ne l'a lancée qu'une seule fois en l'air pour la rattraper avec sa bouche, et c'est la fois où la balle lui est restée dans la gorge. Il apparaît alors tout à fait incertain et même impossible que les enseignants de surveillance dans la cour aient eu le temps d'intervenir entre le moment où l'enfant avait commencé à jouer de façon dangereuse avec sa balle et le moment où l'accident est survenu.
En conséquence, aucune faute de surveillance en lien direct avec la réalisation du dommage n'est établie à l'encontre des enseignants. Seul le fonctionnement défectueux du service public de l'État pourrait être mis en cause devant la juridiction administrative au regard de l'attitude inappropriée de l'agent de service qui a rendu la balle à l'enfant plutôt que la remettre à l'enseignant chargé de la surveillance.
En l'absence de faute démontrée de l'enseignant, les parents sont déboutés de leurs demandes. La responsabilité des enseignants substituée à celle de l'État n'est pas retenue.
• Deuxième action : sur le fondement d'une faute d'organisation du service contre l'État, mais aussi contre la commune devant les tribunaux administratifs.
En première instance
Contre la commune : en raison de la faute commise par la préposée chargée de la surveillance de la cantine : la faute serait d'avoir rendu la balle à l'enfant après lui avoir confisquée pendant le repas, ceci étant en infraction avec le règlement intérieur de l'école interdisant d'introduire dans l'enceinte scolaire des jouets personnels.
À supposer même qu'aucune disposition n'autorise les agents chargés de la surveillance d'une cantine scolaire à retenir des objets confisqués au-delà de la période pendant laquelle les enfants sont placés sous leur responsabilité, et que la restitution de cette balle puisse être considérée comme fautive, il résulte de l'instruction que ce fait ne constitue pas la cause directe de l'accident. L'accident trouve sa cause dans le jeu particulier de l'enfant qui après avoir lancé sa balle en l'air a cherché à la rattraper avec la bouche.
Dès lors les conclusions des parents tendant à ce que la commune les indemnise ne peuvent qu'être rejetées.
Contre l'État : les parents reprochent un dysfonctionnement de la surveillance des enfants pendant la récréation. Leur action met en jeu la responsabilité de l'État sur le fondement d'une mauvaise organisation du service de surveillance de l'école et elle relève alors des tribunaux administratifs.
Au moment de l'accident, la surveillance des 78 élèves en récréation était assurée par deux enseignants. Ces circonstances ne caractérisent aucune faute dans l'organisation du service.
En appel
Les parents de l'élève demandent l'annulation du jugement qui a rejeté leur demande tendant à la réparation par l'État et la commune des préjudices subis du fait de l'accident de leur fils.
L'argumentation retenue par les magistrats en première instance est confirmée en appel. Leur requête est rejetée.
En conséquence les actions menées contre les tribunaux administratifs ont abouti à ce que l'État et la commune ne voient pas leurs responsabilités engagées.
Source : TGI Bobigny, 2002.
Dossier réalisé par Frédérique Thomas, professeur agrégée, docteur en STAPS,
Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand II, mise à jour avril 2012.