La décision
• En première instance
Il appartient aux parents de la victime de prouver la faute commise par un membre de la communauté enseignante de l'établissement scolaire accueillant leur fils lors de l'accident. Or la preuve n'est pas rapportée que les enseignants aient été avisés du caractère dangereux, pour cet enfant souffrant d'une précédente fracture, de se rassembler avec les autres collégiens en vue de regagner sa classe.
Par ailleurs, aucune interdiction de participer à la récréation n'avait été mentionnée par les parents dans le cahier de correspondance de l'enfant. Enfin, il n'est pas prouvé que l'établissement scolaire ait manqué à son obligation de surveillance et de prudence à l'égard d'un enfant déjà blessé, puisque, bien qu'aucune interdiction formelle de participer à la récréation n'ait été officiellement édictée, l'enfant avait été accueilli pendant le temps de la récréation à la ludothèque du collège.
Dans ces conditions, alors qu'aucune faute précise de surveillance et/ou d'organisation ne peut être retenue à l'encontre du collège, (qui ne peut totalement empêcher une légère bousculade entre les élèves à l'heure de rentrer en classe), il n'y a pas lieu de retenir la responsabilité du personnel du groupe scolaire.
• En appel
Les parents de l'élève et lui-même, devenu majeur, demandent la réformation du jugement : ils considèrent que le collège avait été avisé du fait que leur enfant ne devait en aucun cas se rendre dans la cour de récréation avec ses camarades et ils avaient remis à cet effet des certificats médicaux. Ils ne démontrent pas l'existence d'une quelconque faute d'un membre enseignant du collège : le premier certificat médical versé aux débats ne fait état que d'une dispense d'activités sportives et de natation mais, en aucun cas, d'une interdiction de récréation. Le deuxième certificat, dont la validité probante est douteuse, a manifestement été établi pour les besoins de la cause.
Le préfet demande la confirmation du jugement : il considère que les faits reprochés ne sont en aucun cas prouvés par les demandeurs.
La cour d'appel constate qu'il résulte de l'argumentaire du collège, insistant sur la présence de l'élève à la ludothèque pendant la récréation, que ce dernier avait parfaitement conscience de la surveillance particulière qu'il fallait assurer. Ce n'est qu'en raison de la bousculade intervenue dans la cour de récréation que la deuxième fracture a eu lieu.
Or, en laissant l'élève rejoindre ses camarades dans la cour de récréation, à un moment de particulière agitation, l'établissement a manqué à son obligation de surveillance et de prudence. Il y a lieu de retenir la responsabilité du groupe scolaire pour faute de surveillance dans l'accident survenu, faute à l'origine du préjudice subi. La fin de la récréation qui se déroule en milieu de journée scolaire correspond à un temps où les enfants sont placés sous l'autorité de l'établissement.
L'État représenté par le préfet doit garantir la responsabilité de l'établissement et donc réparer les dommages causés à l'élève.
Dossier réalisé par Frédérique Thomas, professeur agrégée, docteur en STAPS,
Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand II.