Le conditionnel est à la fois un temps et un mode.
D'abord utilisé pour exprimer le futur dans le passé (« il a dit qu'il viendrait »), il est devenu un mode, celui de l'imaginaire, de l'irréel (« il viendrait si… ») ; en effet, le futur ne comporte-il pas toujours une part d'incertitude ?
1. Les formes du conditionnel
Le présent du conditionnel
• Les formes du présent du conditionnel s'obtiennent, pour les verbes des 1er et 2e groupes, en ajoutant, au verbe à l'infinitif, les terminaisons : -ais, -ais, -ait, -ions, -iez, -aient (issues de l'imparfait du verbe avoir).
• Pour les verbes du 3e groupe, les terminaisons sont les mêmes mais le radical peut changer. On aura, par exemple : il naîtrait (même radical que celui de l'infinitif) mais : il mourrait, il tiendrait, etc.
• Voici un modèle de conjugaison de ce temps, fourni par l'humoriste Whip :
« Je boirais bien un autre bock Tu devrais bien dire comme moi. Il se ferait un plaisir de nous en offrir. Nous les boirions à sa santé. Vous ne vous en sentiriez que mieux. Des demis vaudraient mieux que des quarts. »
Le passé du conditionnel
• Temps composé, le passé du conditionnel est formé d'un auxiliaire, avoir ou être, conjugué au présent du conditionnel, suivi du participe passé du verbe.
Ex. : « C'était un jeune berger qui aurait aimé se marier. » (Grimm).
• Remarque
Les grammairiens distinguent ce passé usuel, ou passé 1
re forme, du passé 2
e forme qui a le même sens mais dont les formes sont celles du subjonctif plus-que-parfait.
Ex. : « Il restait aussi indifférent que s'il
eût été sourd » (Hector Malot).
2. Les valeurs d'emploi du conditionnel
Le conditionnel temps
• Le conditionnel présent peut prendre une valeur temporelle de futur dans le passé. Il est alors employé dans une subordonnée dépendant d'une principale au passé.
• Ex. : « Il était une fois un roi qui était malade et personne ne pensait qu'il en sortirait vivant » (Grimm).
Cette phrase transcrite au présent donnerait : « Le roi est malade et personne ne pense qu'il en sortira vivant. »
• Dans le passage du discours direct au discours indirect, le présent du conditionnel remplace donc le futur simple de l'indicatif.
Ex. : « Annalja déclara qu'elle n'épouserait jamais qu'un conquérant capable de lui apporter, en cadeau de mariage quatre-vingts villages enchaînés à la selle de son cheval » (Henri Gougaud).
On aurait au discours direct : « Annalja déclare : "Je n'épouserai…" »
• Au conditionnel passé, s'ajoute une idée d'achèvement.
Comparons : « Je savais qu'elle partirait le lendemain » et « Je savais qu'elle serait partie le lendemain ».
Dans le passage du discours direct au discours indirect, le passé du conditionnel remplace le futur antérieur de l'indicatif.
Le conditionnel mode
• Comme son nom l'indique, le conditionnel permet d'exprimer une action soumise à une condition plus ou moins réaliste.
Ex. : « S'il avait trois jours de plus, Barnabé finirait son travail. »
On est ici dans l'irréel ; Barnabé n'obtiendra pas ce sursis.
Mais avec cet autre exemple : « Si c'était nécessaire, nous pourrions vous donner un coup de main », l'action paraît réalisable.
• Le conditionnel présent permet également d'exprimer :
- l'imaginaire, le rêve (ex. : « Ce serait charmant de vivre ensemble. Je me promènerais avec Cosette… », Victor Hugo) ;
- une information donnée comme douteuse (ex. : « Les Américains iraient sur Mars l'année prochaine », à ce qu'on dit) ;
- une éventualité qui scandalise (ex. : « J'ouvrirais pour si peu le bec ? », La Fontaine) ;
- un ordre exprimé poliment (ex. : « Voudriez-vous vous asseoir ? »).
• Le conditionnel passé a les mêmes valeurs modales que le présent mais transposées dans le passé. Il exprime très souvent l'irréel du passé.
Ex. : « Il était une fois un village qui n'avait pas de nom. […] On ne l'appelait même pas "le village sans nom" car, ainsi nommé, il se serait aussitôt vêtu de mélancolie, de secret, de mystère. Il aurait eu un nom » (Henri Gougaud).