« Mon clergé, ma noblesse, mes peuples » : c'est ainsi que le roi de France désigne la société sur laquelle il règne. Chacun de ces trois ordres, ou états, est régi par des lois particulières, c'est-à-dire qu'il dispose (ou ne dispose pas) de privilèges. Comment est organisée la société française sous l'Ancien Régime ?
1. Le clergé, premier ordre du royaume
Les oratores, « ceux qui prient »
• Les membres du clergé sont environ 130 000 en 1789. Il faut distinguer le clergé régulier, obéissant à une règle stricte et vivant parfois à l'écart de la société dans des monastères, et le clergé séculier qui vit parmi la population (« dans le siècle »). En plus de sa mission religieuse, le clergé assure l'enseignement, l'assistance aux pauvres et la tenue des registres paroissiaux (qui enregistraient les baptêmes et les morts).
• Le clergé reçoit des aumônes et collecte la dîme (une partie de la récolte des paysans). L'Église possède environ 10 % des terres du royaume. Bien qu'elle ne soit pas soumise à l'impôt, elle accepte de payer régulièrement à l'État le « don gratuit », dont elle fixe elle-même le montant.
• Le clergé est très hétérogène. Le haut clergé, abbés et évêques souvent recrutés parmi les nobles, vit richement. Le bas clergé, moines et curés, issu du tiers état, est très pauvre et ne survit souvent que grâce à l'aide des fidèles.
2. La noblesse, gardienne du royaume
Les bellatores, « ceux qui combattent »
• En réalité, la noblesse n'est pas exclusivement composée de militaires : elle fournit également les grands administrateurs du royaume. On oppose donc la noblesse d'épée, généralement plus ancienne, à la noblesse de robe, acquise plus récemment et constituée par les magistrats et les parlementaires. À la fin du xviiie siècle, le second ordre rassemble environ 300 000 personnes.
• Les conditions de vie des nobles peuvent être très différentes. La haute noblesse vit à la Cour. Elle dispose de revenus importants mais elle s'endette en menant une vie fastueuse. Riche et cultivée, la noblesse de robe réside dans les grandes villes du royaume. Les autres membres de la noblesse vivent sur leurs terres, parfois très modestement.
• La noblesse fait l'objet d'un certain nombre de privilèges. Avant tout, elle est exempte d'impôts et refuse toute remise en cause de cet avantage. Les nobles sont aussi les seuls à pouvoir porter l'épée et à chasser. Ils occupent les plus hauts grades dans l'armée et les plus hautes fonctions dans le clergé.
3. Le tiers état, le peuple de France
Les laboratores, « ceux qui travaillent »
• Le tiers état rassemble plus de 98 % de la population et produit l'essentiel de la richesse du royaume. Les bourgeois contrôlent la vie économique du pays et la plupart souhaitent devenir nobles. Mais, au xviiie siècle, le nombre des offices qui confèrent la noblesse n'augmente pas assez vite. Cela crée un véritable sentiment de frustration.
• Vers 1700, la population urbaine connaît une certaine croissance mais représente moins de 20 % des Français. C'est la bourgeoisie qui administre la ville. Les artisans et les commerçants sont organisés en corporations qui monopolisent et réglementent les activités professionnelles. Le petit peuple forme plus du tiers de la population urbaine et vit de petits métiers : porteurs d'eau, ramoneurs, lingères, domestiques…
• 80 % des Français sont des paysans. Le village se groupe autour de l'église paroissiale. L'assemblée des villageois se réunit le dimanche après la messe. Elle répartit les impôts et organise les travaux agricoles. Les paysans les plus riches sont les laboureurs. Ils possèdent une charrue, un attelage et assez de terres pour vivre. Les fermiers et les métayers sont obligés de louer des terres. La majorité des paysans vit de sa force de travail : ce sont les manœuvriers, les journaliers et les domestiques, qui louent leurs bras chez des propriétaires aisés. Il existe de nombreux petits métiers dans les villages : aubergistes, tonneliers, charrons, forgerons, etc.