À l'humanisme triomphant de la première moitié du xvie siècle succède en Europe un sentiment de désenchantement et de grande incertitude, qui va se traduire par un vaste mouvement artistique et culturel : le baroque. Le terme a à l'origine une dimension péjorative, il qualifie ce qui est d'une « bizarrerie choquante ». Ce n'est qu'à la fin du xixe siècle qu'il entre dans le vocabulaire de l'histoire de l'art pour désigner les créations qui apparaissent après le maniérisme italien de la Renaissance jusqu'au rococo du xviiie siècle. Cependant, la France a résisté en grande partie à ce mouvement et s'est rapidement tournée vers une autre sensibilité artistique, qui, tout en se différenciant nettement du baroque, ne l'a pas ignoré : le classicisme.
1. Les origines du mouvement
a) Le contexte historique
• Le baroque apparaît tout d'abord en Italie et il se caractérise en premier lieu comme une expression artistique liée à la Contre-Réforme. L'Église catholique entend ainsi réaffirmer et manifester sa puissance triomphante par des œuvres artistiques monumentales et plus luxueuses. Le baroque se déploie ainsi d'abord dans les églises afin de mettre en scène la foi de façon spectaculaire.
• Cependant, rapidement, il va se détourner de sa vocation religieuse et spirituelle première pour se diffuser dans toute la société et dans toute l'Europe, en particulier en Espagne et au Portugal, et par le biais de ces pays, dans les colonies d'Amérique du Sud, mais aussi dans les Pays-Bas catholiques, en Allemagne et en Autriche.
b) Les manifestations
• Liés à la Contre-Réforme mais aussi à un sentiment nouveau d'instabilité et d'incertitude, les traits caractéristiques du baroque sont donc le spectaculaire, la prolifération de formes exubérantes et mouvementées, la richesse du coloris et le goût de l'illusion et du trompe-l'œil afin de provoquer l'émotion et la surprise.
• La peinture connaît une évolution notable en Italie, marquée par deux courants antithétiques représentés par deux groupes d'artistes : d'un côté, le Caravage et les caravagesques, de l'autre, les Carrache. Tout en témoignant d'une certaine influence baroque, les Carrache, qui forment l'école bolonaise, annoncent surtout le classicisme et s'avèrent en décalage avec l'esprit de la Contre-Réforme par leur éclectisme et leur humanisme païen. Au contraire, le Caravage, après avoir peint à Rome, s'installe à Naples où il a un rayonnement important au sein de l'école napolitaine. Il pratique un « naturalisme » baroque et reprend les thèmes chrétiens, mais en les transposant dans un cadre réaliste. Le peintre aura une grande influence tout au long du xviie siècle dans le reste de l'Europe.
2. Le baroque en France
a) La peinture
• Il reste problématique de parler d'une peinture baroque en France, tant il est vrai que la plupart des peintres français expriment en même temps les aspirations contradictoires du siècle entre baroque et classicisme.
Il faut également noter que la majorité des peintres français ont subi l'influence italienne et ont souvent séjourné, voire vécu en Italie. L'influence du Caravage se fait particulièrement sentir sur les débuts de Simon Vouet mais aussi sur Valentin de Boulogne ou Claude Vignon. Le naturalisme du peintre et ses jeux de lumière se retrouvent dans les œuvres de ces artistes.
• L'influence du Caravage se fait également sentir chez un autre peintre majeur de l'époque : Georges de La Tour. Celui-ci, Lorrain dont on sait fort peu de choses, crée des peintures au naturalisme empreint de spiritualité d'une force saisissante. Le peintre se distingue par sa singularité et pourrait également être étudié dans le courant classique, par la rigueur et la gravité de ses compositions.
• La peinture française connaît une autre influence, en particulier dans la deuxième moitié du siècle, celle de Rubens. En effet, Marie de Médicis avait fait appel au Flamand Rubens, représentant du baroque septentrional, pour décorer le palais du Luxembourg. Souvent animé d'un souffle épique, le style de Rubens se caractérise par une virtuosité et une fougue baroques. Le mouvement, la lumière et les couleurs sont libérés dans son œuvre et mis au service de spectacles souvent grandioses.
b) La sculpture et l'architecture
• La sculpture française résiste au baroque, les quelques artistes qui ont exprimé le mouvement l'ont fait avec nuances et tout en témoignant également de l'importance d'un goût plus classique pour la mesure. Ainsi, Antoine Coysevox est influencé par le Bernin. Ses bustes de Louis XIV et du Grand Condé, par le mouvement expressif des perruques et des draperies, rappellent les œuvres du Bernin. De même, Pierre Puget, qui a été formé en Italie, rappelle la force du génial sculpteur italien, en particulier dans Milon de Crotone, qui représente avec une grande expressivité la souffrance de l'athlète en train de se faire dévorer par un lion.
• Les jésuites français répandent la Contre-Réforme en France et accordent beaucoup d'importance à l'architecture des églises. Ainsi, sur le modèle italien, se développent des ornements mouvementés sur les façades, des dômes et des coupoles, une décoration et un mobilier luxueux et chargés à l'intérieur des églises. Les grands architectes que sont Le Vau et Mansart infléchissent le baroque vers le classicisme français en lui donnant ses plus grandes réalisations, comme le château de Maisons-Laffitte, le château de Vaux-le-Vicomte ou Versailles.