Au milieu du xiie siècle, la France voit s'épanouir de façon relativement précoce par rapport aux autres pays européens une autre forme de création : l'art gothique. Cette appellation a à l'origine une dimension péjorative : les hommes de la Renaissance considèrent en effet tout l'art du Moyen Âge comme « gothique », c'est-à-dire venant des Goths, ces barbares qui ont envahi l'Italie au ve siècle. Pourtant, le gothique est un vaste mouvement artistique, qui s'épanouit en particulier dans l'architecture, mais aussi dans la peinture et la sculpture.
1. Architecture
• L'architecture gothique se caractérise par un élancement de ses lignes, par un allégement de la structure des édifices, par une tendance à la verticalité. Les murs s'ajourent davantage pour laisser la place aux vitraux. Différentes innovations techniques permettent cette évolution. Les architectes gothiques mettent au point la voûte sur croisée d'ogives, c'est-à-dire une voûte d'arêtes renforcée par deux ogives qui se coupent en diagonale à la clef.
• La voûte sur croisée d'ogives est à la fois plus solide et plus légère que la voûte romane, puisque le poids de la voûte porte sur les quatre angles. Pour contrebalancer ce poids, les architectes utilisent les arcs-boutants qui soutiennent extérieurement le vaisseau central. Les premiers vrais arcs-boutants apparaissent à la fin du xiie siècle, à Notre-Dame de Paris en particulier ; peu à peu ceux-ci se chargent à leur tour d'éléments décoratifs sculptés (clochetons, pinacles, gargouilles, etc.) pour constituer un aspect caractéristique de l'allure extérieure de l'édifice. Enfin, l'arc en plein cintre, si caractéristique de l'art roman, est définitivement abandonné au profit de l'arc brisé.
• Le gothique qui s'étend du xiie siècle au xve siècle connaît différentes périodes. La première réalisation gothique est l'abbatiale de Saint-Denis, reconstruite à partir de 1135, elle appartient à ce que l'on nomme le gothique primitif, de même que Notre-Dame de Paris qui se présente comme l'aboutissement de cette période. L'âge d'or du gothique correspond au xiiie siècle. Les grandes cathédrales, qui se dressent majestueusement vers le ciel, se multiplient partout en France, chaque réalisation ambitionnant d'être plus grande, plus haute et plus légère que les précédentes, à mesure que les techniques se perfectionnent. De cette période datent Notre-Dame de Chartres, Notre-Dame de Reims et Saint-Étienne de Bourges. Enfin, au xve siècle s'épanouit le gothique flamboyant : les ornements se font de plus en plus raffinés, les voûtes sont décorées de clefs pendantes, les sculptures s'enrichissent et ressemblent à de la dentelle.
• L'architecture civile se développe dans le sillage de l'architecture religieuse. Au Moyen Âge, les villes sont bâties en maisons de bois à encorbellement mais aussi en maisons de pierre, plus résistantes, qui abritent au rez-de-chaussée les boutiques. À partir du xiiie siècle, les nobles ou les personnages influents se font construire de belles demeures où la recherche du confort et d'un certain luxe se fait jour. L'hôtel Jacques-Cœur de Bourges, du xve siècle, en présente un bon exemple.
2. Sculpture
• Dans les cathédrales, la sculpture gothique abandonne la stylisation de la sculpture romane et accorde une grande attention aux motifs végétaux réalistes. De même, elle abandonne les chapiteaux au profit de la façade des édifices. Des principes s'imposent d'une cathédrale à l'autre : le portail central représente le Jugement dernier, avec le Christ et les apôtres, un portail latéral est réservé aux saints honorés localement, l'autre met en scène la Vierge. Les colonnes s'ornent de statues longilignes, sculptées directement dans la masse, qui prennent peu à peu leur autonomie et forment un ensemble à part se détachant de la paroi, comme à la cathédrale de Reims.
• À partir du xive siècle, la sculpture revient à l'intérieur des églises et des cathédrales, pour orner les chapelles, les retables ou les monuments funéraires, par exemple avec les gisants dont les visages sont souvent réalisés d'après des masques moulés sur le visage du défunt.
3. Peinture, miniature et vitrail
• La miniature et l'art de l'enluminure continuent à se développer à Paris mais également en province. Un des chefs-d'œuvre est donné par les frères Limbourg avec Les Très Riches Heures du duc de Berry, au début du xve siècle. La peinture murale qui rayonnait dans les églises au temps de l'art roman pâtit du développement des vitraux. Cependant, au xve siècle, on en connaît encore quelques beaux exemples comme La Danse macabre de La Chaise-Dieu.
• Mais la couleur qui s'impose dans les cathédrales gothiques est celle des vitraux, dont le développement accompagne à merveille l'allégement des murs rendu possible par la nouvelle architecture. Les vitraux du xiie siècle, ceux de Chartres, sont remarquables par la pureté de leurs couleurs et la précision de leurs motifs. L'art du vitrail continue à se développer tout au long de la période, pour produire au xve siècle de véritables tableaux présentant en arrière-plan de petits paysages.
• Le tableau apparaît au xive siècle : Paris voit naître le gothique international, notamment grâce au talent des artistes flamands qui travaillent à la cour des rois français. Ce mouvement au maniérisme raffiné prend rapidement une dimension européenne. Au xve siècle, la création picturale se déplace en province, notamment en Bourgogne et dans les pays de la Loire ; parmi les peintres importants de l'époque on peut citer Jean Fouquet ou le Maître de Moulins. Par ailleurs, une innovation capitale modifie cet art et aura un long retentissement : la vulgarisation de la peinture à l'huile.