Sujet 2019, groupement académique 1
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Sujet

Sujet

L'épreuve est notée sur 40 points : 11 pour la première partie, 11 pour la deuxième et 13 pour la troisième ;
5 points permettent d'évaluer la correction syntaxique et la qualité écrite de la production du candidat.
Une note globale égale ou inférieure à 10 est éliminatoire
Corrigé

Corrigé

I. Question relative aux textes proposés (11 points)
Remarques
• Ce que l'épreuve désigne comme une « analyse » reste un exercice assez convenu, qui consiste à confronter plusieurs textes (généralement quatre) à l'appui d'une « question ». Celle-ci, reformulée de manière plus personnelle (avec ladite problématique), vous invite à relever, dans les documents du dossier, tout ce qui peut apporter des éléments de réponse sur le sujet à traiter. Dans huit cas sur dix, le sujet concerné tient en quatre ou cinq mots (ici, la « dynamique de la révolte »). Le rapport de jury 2018 de l'académie d'Aix-Marseille, parmi d'autres, « rappelle l'importance d['une] lecture attentive et de la nécessité de faire le lien entre chacun [des textes] et la problématique donnée ». Concrètement, celle-ci ne nécessite le plus souvent qu'une légère reformulation de la « question posée ». Quant au caractère « analytique » de l'épreuve, celui-ci est dû au fait que les candidat(e)s doivent non seulement relever ces éléments de réponse, mais aussi les points de convergence et de divergence entre les documents. Il vous appartient donc de fournir une rédaction organisée autour d'un plan en deux ou trois parties, avec une éventuelle – mais courte – conclusion.
• Les rapports de jurys constituent pour la préparation une mine de conseils, tant sur les exigences de présentation, que sur la pratique d'écriture de l'épreuve. Ainsi celui de l'académie de Paris pour la session 2017 recommande-t-il de « consacrer le temps nécessaire à l'analyse du libellé du sujet pour appréhender la question posée dans sa globalité », et pour cela de « s'entraîner à hiérarchiser les arguments dans une démonstration, s'exercer à introduire un sujet en le problématisant, et […] veiller à la concision dans l'annonce du plan (qui ne doit pas prendre la forme d'une succession d'interrogations) ». Le rapport en question note à ce propos qu'« une problématique est une question que l'analyse du libellé du sujet fait émerger et à laquelle la copie doit apporter une réponse ». Le rapport de l'académie de Lyon (2017) précise à cet égard que beaucoup de copies « se contente[nt] de résumer le contenu de chaque texte sur un mode narratif, plutôt qu'[elles] n'en cerne[nt] les enjeux, les intentions, les effets », et que c'est au contraire à partir d'une « m[ise] en tension [d]es textes […] que naîtra la problématique ». Le même document confirme d'ailleurs que celle-ci « doit être amenée par ce qui précède, et non être énoncée de façon arbitraire » : de fait, « il est souvent nécessaire de reformuler avec clarté la question posée par le sujet, afin de démontrer une appropriation des enjeux du corpus ».
• Pour ce qui concerne l'intitulé du sujet dont le corrigé suit, il s'agit bien des « processus à l'œuvre » d'une « dynamique », en l'occurrence celle de la révolte. Étant donné que celle-ci se manifeste de différentes manières, on peut supposer qu'il est incontournable de réserver un moment pour parler de son expression. En outre, la révolte n'est pas issue de rien : elle est motivée et, le plus souvent, véhicule ou conforte des valeurs en particulier. C'est donc un plan en trois parties que nous choisissons ici (les parties n'ont pas besoin d'être complètement égales en volume). Ajoutons en revanche qu'il existe un relatif consensus, dans le dossier, entre les textes du corpus, ce qui mérite d'être souligné.
• Enfin, qu'on se rassure concernant le volume du présent corrigé : en général, votre analyse sera plus courte d'un tiers (le corrigé ci-dessous étant donc plus exhaustif qu'attendu au CRPE).
Une révolte a le plus souvent sa dynamique singulière, dont les manifestations et les ressorts sont plus ou moins liés aux circonstances, mais également à ce qui la précède, avec plusieurs processus à l'œuvre. Les différents auteurs du corpus traitent ce sujet dans des genres et à travers des approches dont la diversité peut déconcerter, mais qui permettent à l'analyse d'en éclairer tous les aspects. Ainsi Henry Bauchau, dans le chapitre xix d'Antigone (1997), précisément intitulé « La Colère », et bien avant lui Aristophane avec Lysistrata (411 av. J.-C.), mettent-ils en scène la révolte des femmes, tandis qu'Émile Zola narre les prémisses d'un mouvement social dans Germinal (1885), une révolte qu'Albert Camus, avec L'Homme révolté (1951), examine sur le plan philosophique et moral.
On s'interrogera donc sur les processus-clés qui définissent une dynamique de la révolte, que celle-ci soit individuelle ou collective. Pour cela, il convient d'abord d'envisager les manières dont elle s'exprime au sein des différents textes, pour aborder ensuite, d'une part, ce qui la motive à proprement parler – pour ainsi dire ce qui est à sa source – et, d'autre part, les valeurs qu'elle véhicule.
L'expression de la révolte passe d'abord par la voix et la verbalisation du refus, qui sonne à travers le « non ! » et le « jamais ! » d'Antigone, qui se résument dans un « cri ». Semblables répliques prennent des contours encore plus concrets dans l'œuvre d'Aristophane : au contraire de la colère d'Antigone, c'est avec une fermeté implacable que Lysistrata répond à son détracteur, jusqu'à lui sommer froidement de se taire. Cela est lié à la « modération exemplaire » dont ont fait preuve les femmes jusqu'ici, et qui doit à présent laisser place au refus. Cette manifestation verbale de la dénégation apparaît dans la voix du narrateur chez Zola, à travers le discours indirect libre du premier paragraphe et des dernières lignes du passage, jusqu'au juron que l'on pourrait sans doute prêter à l'auteur. Et quand la Maheude s'en mêle, c'est pour un propos lapidaire, tout aussi expressif que les exclamations du Maheu. Mais il existe également, pour les auteurs, une physiologie de la révolte : ainsi l'indignation et la colère « s'échappent[-elles du] corps » d'Antigone chez Bauchau, qui est proprement hors d'elle, comme indiqué dès les premières lignes de l'extrait. Dans l'extrait de Germinal, un « malaise vague » plane au-dessus des corps avachis, prémisses de la révolte des poings et des torses. Avant tout, et comme le rappellent Antigone et Lysistrata, reprendre ses droits revient à ne plus se taire, car « se taire », « c'est laisser croire qu'on ne juge et ne désire rien », pour reprendre Albert Camus. Pour ce dernier, le révolté « fait face », à proprement parler.
Pour autant, ce qui motive la révolte n'a rien d'univoque, au contraire. Féministe bien avant les formes de militantisme de notre monde contemporain, Lysistrata ne peut que constater la faillite de l'administration exclusivement masculine : l'héroïne va alors « mettre le trésor en sûreté », administrer les dépenses de la citadelle, et de ce fait la défendre malgré les hommes et leur « loi virile », pour reprendre les termes de Bauchau. On retrouve également bien là ce qui provoque la rébellion d'Antigone contre les « guerres imbéciles ». Or, c'est aussi pour en finir avec des conflits de classe que la Maheude, dans Germinal, prend fait et cause contre le travail de « galériens » imposé par une transmission patrilinéaire et l'industrie patriarcale. En ce sens, les textes de Zola et d'Aristophane sont tout aussi politiques l'un que l'autre : en mettant en scène des gens se révoltant contre les conditions de travail déplorables d'un côté, et de l'autre contre un pouvoir belliqueux, les œuvres narrent et décrivent une généalogie de la révolte. En auteur naturaliste, Zola y ajoute une vive critique de la vie quotidienne des forçats de l'usine, « entassés », « parqués » comme des « bêtes ». Empêtrés dans les dettes et la débâcle journalière, les ouvriers et les ouvrières ne peuvent plus se contenter de leur résignation. Camus insiste plus philosophiquement sur l'« adhésion entière et instantanée de l'homme à une certaine part de lui-même », contre sa « condition », dont en particulier l'humiliation de son « supérieur » qui le réduit à l'état d'esclave. L'auteur nuance son propos toutefois en indiquant que le révolté « dit à la fois oui et non » : il « affirme » tout en s'opposant. Car se rebeller est un « droit », comme rappelé par Antigone, y compris envers la patrie.
Parallèlement, la révolte devient aussi un devoir, car elle s'avère porteuse de valeurs. Rien de telle qu'Antigone pour le rappeler : alors que s'exprime la barbarie des hommes, la protagoniste entend rester « définitivement rebelle ». Détentrice d'une éthique, elle rejette le « crime » de Créon comme un sacrilège, à ce point défenseure d'un idéal qu'elle se sent portée par la « foule », qui avec elle « piétine sauvagement » un édit générateur de conflit. « Nous, les femmes », clame Antigone, qui refuse comme Lysistrata de supporter davantage la conduite des hommes : une fois « réuni[es] », les femmes se dressent contre un désordre établi. D'après Camus en effet, « tout mouvement de révolte invoque tacitement une valeur » : faire volte-face, c'est dans le même temps marquer une « frontière ». Ce terme est intéressant, car il rejoint cette limite qu'évoque allusivement Zola, limite à l'« injustice », aux conditions de vie indécente et aux « chefs ». L'écriture qui en donne les justifications de manière la plus condensée demeure celle de L'Homme révolté : on saisit avec Camus que la résistance, « irréductible » à l'homme, est l'occasion de revenir à lui-même, à la « conscience » d'êtres en devenir. Dès lors, le refus constitue l'expression première du sentiment d'être dans son « bon droit », derrière les valeurs universelles de l'Humanité.
II. Connaissance de la langue (11 points)
1. 
Identification du temps et du mode des verbes soulignés, avec justification de leur emploi (texte 2)
Remarques
• On peut ici classer les formes verbales de deux façons : d'une part en distinguant les modes les uns des autres, d'autre part en s'appuyant sur la justification de leur emploi (autrement dit à partir de leurs « valeurs contextuelles »). Restons opérationnels : c'est le premier type de classement qui est le plus adapté au CRPE, à la fois en termes de temps de réponse et de facilitation de la tâche des évaluateurs.
• Ici, les verbes, de formes simples et composées, sont donnés par le dossier, mais ce n'est pas toujours le cas. Seuls cinq d'entre ceux employés sont soulignés : quasiment tous étant conjugués à l'indicatif, il n'y a pas lieu de fournir un catalogue trop détaillé. Une prise de position est néanmoins attendue concernant le conditionnel.
On veillera dans tous les cas à bien distinguer les éléments de réponse les uns des autres (modes/ temps/ emplois).
a) L'indicatif
1. Formes simples
L'extrait contient deux verbes conjugués à une forme simple de l'indicatif : « (me) taisais », à l'imparfait (personne 1), et « est », au présent (personne 3), respectivement des verbes se taire et être.
Le premier emploi se justifie par l'expression d'un passé répétitif, sélectionnant de ce fait la valeur dite « sécante » de l'imparfait, tandis que le deuxième correspond à un présent de généralité (un constat récurrent contre lequel se révolte la protagoniste).
2. Formes composées
Deux verbes sont concernés : « a résolu » (résoudre au passé composé, personne 3), et « serait arrivé » (arriver au conditionnel passé, personne 3).
Le passé composé reste le temps le plus fréquemment employé pour exprimer le passé dans le fil du dialogue (ici entre Lysistrata et le Magistrat). Le conditionnel, ici passé (ou de forme composée), figure en emploi modal pour formuler une éventualité qui ne s'est pas concrétisée.
[Remarque : Cet aspect fait partie des « valeurs » possibles d'un conditionnel dont la principale spécificité consiste à exprimer un futur dans le passé, ce pourquoi il est préférable de l'inclure parmi les temps de l'indicatif.]
b) L'impératif
De forme simple, le « tais-toi » de la première réplique équivaut à un ordre, conformément au caractère injonctif de presque tous les emplois de l'impératif.
2. 
Composition et sens du mot « approbation » (texte 1), puis deux mots de la même famille
a) Composition du mot « approbation » et sens en contexte
Il est assez embarrassant d'expliquer la formation du mot approbation, puisqu'il s'agit d'un emprunt direct au latin ecclésiastique (approbatio). On y retrouve néanmoins la racine latine du verbe probare, nominalisée, et assortie de ce qui peut être le préfixe a(d)- (que l'on retrouve dans le mot de même famille ap-prouver, avec la trace ancienne d'une dérivation lexicale).
On pourrait décomposer le mot en trois parties : deux affixes et une base, -proba-. Le préfixe a(d)-, amendé en ap(p)-, signifie la mise en action, mais également le passage d'un état à un autre (le fait d'approuver, ici, autrement dit de soutenir – il s'agit de la « foule »). Le suffixe -tion, lui, permet de nominaliser la base verbale pour indiquer cette action.
b) Deux mots appartenant à la même famille
On compte, parmi les mots de même famille qu'« approbation », son antonyme réprobation et la gamme des verbes qui leur correspondent, tels qu'approuver, prouver ou réprouver. À savoir que le terme probation, vieilli mais non archaïsant dans certains contextes, existe encore.
3. 
Identification des différentes propositions (grammaticales) et de leur fonction (texte 3)
Remarques
• Un incontournable du CRPE : les propositions grammaticales. Indiquons que de multiples classifications existent dans ce domaine, avec des appellations plus ou moins jargonnantes (ainsi peut-on parler, par exemple, de « propositions subordonnées conjonctives circonstancielles », de « conjonctives complétives » ou encore de « relatives adjectives restrictives »). Cette approche implique que les candidat(e)s notent que certaines propositions sont indépendantes, et que d'autres sont dépendantes (ou subordonnées). La nomenclature de celles et ceux qui vous corrigent est peut-être discutable, mais l'objectif est d'avoir le concours… (c'est ainsi que nous parlerons de « proposition principale » quand un groupe verbal contient le verbe noyau sur lequel la ou les subordonnées prennent appui).
• Pour rappel, une proposition grammaticale est un groupe de mots constitué au minimum d'un verbe et de son sujet, avec d'éventuels compléments et/ou attributs. Seules les propositions subordonnées ont une fonction par rapport à tel ou tel (groupe de) mots.
Dans cette phrase, on compte deux propositions coordonnées l'une à l'autre par la conjonction car. À l'intérieur de la première se glisse une proposition subordonnée.
  • « Seul, le père Bonnemort, s'il était là, ouvrait des yeux surpris » : ce premier temps de la phrase est constitué d'une proposition principale (« Seul, le père Bonnemort ouvrait des yeux surpris ») dans laquelle s'enchâsse une proposition subordonnée circonstancielle (« s'il était là »), laquelle est introduite par la conjonction de subordination si (ici élidée).
  • « de son temps on ne se tracassait pas de la sorte » : indépendante à proprement parler, cette proposition est coordonnée à la précédente.
4. 
Transposition au discours indirect d'un passage (texte 2)
Remarques
• Ce type de question fait partie des attendus du CRPE, car la reformulation d'un discours direct au discours indirect permet de mesurer plusieurs capacités (ou difficultés !) chez les candidat(e)s : d'une part, celles consistant dans la reprise des informations et le délaissement de certaines « aspérités » de l'oral ; d'autre part, celles concernant l'emploi des temps, les formes pronominales, la ponctuation et plus généralement les exigences liées au passage à l'écrit.
• Ainsi, dans ce cas, les verbes au présent virent au passé, l'inversion verbe-pronom (sujet) de l'interrogation directe (chez le Magistrat) s'efface, tout comme les intensifs tels que donc. La difficulté ici consiste à ajouter deux autres verbes introducteurs, et à appliquer la concordance des temps (notamment l'expression du futur dans le passé).
Au discours indirect, le passage donnerait ceci :
Lysistrata affirma que c'était pour avoir le moyen de voler que Pisandre et tous les ambitieux suscitaient continuellement de nouveaux troubles. Elle ajouta qu'ils ne toucheraient plus rien de cet argent. Le Magistrat lui demanda (alors) ce qu'elle ferait (/comptait faire).
5. 
Deux procédés d'écriture au moins permettant d'analyser les moyens par lesquels Étienne exprime ses convictions et cherche à persuader ses interlocuteurs (texte 3)
Remarques
• Notons tout de suite que lorsque le concours évoque « deux procédés d'écriture au moins », c'est qu'il en est attendu trois ou quatre.
• Ce type de question, pour ainsi dire courante au CRPE depuis 2014, vise à placer l'analyse dans une dynamique figurale et rhétorique. Il est de ce fait judicieux de se munir d'un petit catalogue des « figures de style » les plus fréquentes (cf. fiche Les figures de style).
Dans cet extrait, de multiples procédés permettent au narrateur de vivifier l'expression de la révolte. Certains relèvent des propos rapportés : ainsi le discours indirect libre des phrases 2 et 3 permet-il d'entrer dans la psychologie du personnage d'Étienne, qui « s'animait ». On le note à travers les exclamations (« Comment ! », « Eh ! ») et le recours au conditionnel, renvoyant ici à une éventualité rejetée par le personnage. Ce procédé est conforté par un autre, celui des questions rhétoriques, en particulier celle de la fin de l'extrait (« pourquoi donc n'aurait-on pas joué des poings, en tâchant d'être le plus fort ? »), de même que le « Est-ce que tous les citoyens n'étaient pas égaux […] ? », au milieu du passage.
L'expression de la rébellion passe aussi par le recours à l'intensification de la formulation : l'anaphore telle que « ça poussait, ça poussait petit à petit », l'accumulation des pluriels en milieu de texte (« tous les citoyens »/ « les pères »/ « les grands-pères »/ « aux fils »), mais aussi l'hyperbole (« une armée d'hommes », par exemple), contribuent toutes à donner de l'intensité au ressentiment provoqué par l'oppression.
Les analogies ne sont pas en reste : en témoignent les comparaisons d'un mineur « viva[nt] dans la mine comme une brute, comme une machine à extraire la houille », « germa[nt] dans la terre ainsi qu'une vraie graine », ou encore la personnification des « grandes Compagnies » qui, « avec leurs machines, écrasaient tout ».
Les figures d'opposition, enfin, jalonnent l'extrait, parmi lesquelles l'antithèse confrontant le passé des « riches » qui « avaient […] beau jeu de s'entendre », au « à présent » de la révolte, ainsi que la négation qui parcourt l'extrait, marque d'une limite donnée à l'infamie.
III. Analyse de supports d'enseignement (13 points)
Remarques
• La « Q3 », autrement appelée « question de didactique », se révèle assez stable depuis 2015 au CRPE ; elle consiste en une analyse d'un dossier composé d'un ou plusieurs supports d'enseignement en lien avec les Programmes de l'école primaire. Ces supports sont le plus fréquemment :
  • une description ou une transcription d'une situation de classe (activité ou élément de progression, dialogue pédagogique) ;
  • des productions d'élèves (écrites ou orales, éventuellement les deux) ;
  • des écrits de travail (fiches de préparation, programmation, bilan, grille d'évaluation, etc.).
Contrairement à ce que détaille le cadrage du Ministère, les manuels scolaires sont quasiment absents de l'épreuve, pour des raisons à la fois techniques et réglementaires. En revanche, on note une présence accrue des transcriptions de séances et d'extraits de séquences pédagogiques. En outre, il s'agit certes de témoigner d'une « capacité à maîtriser les notions présentes dans les situations d'enseignement » (document de cadrage, confirmant la valence didactique du travail), mais la réflexion est également pédagogique, en ceci qu'elle s'appuie sur des questions de mise en œuvre et de pratique (matérielle, organisationnelle) de l'activité.
• Là aussi, les rapports des jurys de concours contiennent des recommandations très utiles. Celui de l'académie de Bordeaux (2017) rappelle ainsi que « les documents proposés à l'épreuve sont choisis précisément parce qu'ils offrent prise à une critique étayée et construite, ce que les candidats ne s'autorisent pas suffisamment ». Le rapport regrette dans cette perspective que « cette analyse distanciée [fasse] trop souvent défaut, les candidats se limitant à un "regard" très superficiel sur les choix opérés par l'enseignant ».
Entendons-nous bien : une critique objective ne se borne pas à faire la liste de ce qui est discutable ou de ce qui ne convient pas. Elle doit rester « constructive et argumentée », autrement dit indiquer les limites des démarches et des supports d'enseignement, tout en montrant en quoi ils restent ou pourraient être pertinents. Par exemple, pour une activité dont on dispose de la consigne (ce qui est généralement le cas au CRPE), on expose d'une part ce qu'on est en droit d'attendre de l'élève compte tenu du cycle et du niveau de classe, et d'autre part les atouts et les faiblesses de la situation ou de la production. À ce titre, le rapport de l'académie d'Orléans-Tours (2017) parle d'une « analyse critique consist[ant] pour les candidats à se positionner par rapport aux conséquences didactiques des choix de l'enseignant », y compris en termes de « points négatifs » et « positifs ».
Les conseils méthodologiques de celui de l'académie de Nantes (2017) s'inscrivent directement dans la pratique de l'épreuve, et donnent des pistes pour sa préparation : le document précise que « la bonne prise en compte des consignes formulées, la perception de la spécificité de chacune des questions et la délimitation du champ de questionnement que chacune recouvre doivent être des points de vigilance. On ne peut, sur ce point, que recommander aux candidats de lire avec attention l'ensemble des questions et des documents pédagogiques proposés avant de se lancer dans la rédaction ». En effet, l'un des problèmes récurrents de la « Q3 » est de soumettre une série de questions qui se recoupent en partie, contraignant les candidat(e)s à répartir les éléments de réponse dans une forme d'exercice d'équilibre. Il importe donc de bien prévoir cette répartition, même en l'absence de barème.
1. 
Compétences définies par les Programmes travaillées dans la séquence relatée (document 1)

La première séance permet, au titre d'une « mise en situation », de « se préparer à la lecture du texte » par l'identification d'indices et la catégorisation du genre et du « type d'écrit » de l'œuvre.
Les compétences exercées consistent à :
  • identifier les informations importantes du texte, et notamment le genre et ses enjeux (caractéristiques) ;
  • interpréter l'histoire à partir d'indices (explicites comme implicites), à titre introductif.
Par la suite, une phase de recherche en groupe (réponses à des questions), en séance 2, conduit les élèves à :
  • comprendre le fonctionnement narratif du récit, en l'occurrence enchâssé ;
  • exprimer, à l'occasion des échanges, un point de vue de manière claire et organisée, tout en prenant en compte le point de vue d'autrui, ainsi qu'en échangeant avec civilité.
La troisième séance, qui vise à l'exploitation de l'extrait par des dessins susceptibles de restituer la compréhension qu'en ont les élèves, mobilise des compétences dans les termes suivants :
  • repérer les personnages et construire une représentation « mentale » pour comprendre le texte ;
  • entrer dans une stratégie explicative lors d'un échange organisé (il s'agit dans ce cas de justifier son interprétation ou sa réponse en citant l'extrait) ;
  • se servir des informations contenues dans le texte et des relations entre différents documents (ici des dessins).
Alors que la séance 4 vise à faire « repérer par quels procédés le conteur retient l'attention de ses auditeurs », la cinquième passe à l'écriture : les élèves sont invités à « écrire une histoire à la manière du vieil homme ». Dans cette perspective, les compétences ciblées correspondent :
  • au fait de mobiliser des connaissances liées à l'univers évoqué ;
  • à ceux de recourir avec spontanéité à la lecture, formuler ses impressions, sa compréhension ainsi que des hypothèses, tout en articulant sa production, en faisant preuve d'imagination et surtout en manifestant sa connaissance des caractéristiques d'un genre d'écrit en particulier.
La séance 6, toujours dans le cadre de ce même projet d'écriture, implique une phase importante d'auto-évaluation, à l'occasion de laquelle les élèves ont à :
  • retravailler leur écrit au titre d'une réécriture démontrant leur plus ou moins grande capacité à savoir organiser leur propre texte, rester cohérent, et utiliser leurs connaissances sur la langue ;
  • améliorer, par conséquent, le brouillon, y compris en respectant l'orthographe lexicale et grammaticale ;
  • mettre à distance leur texte pour l'évaluer (tout en sachant repérer les éventuelles difficultés à la faveur d'une attitude active et réflexive).
En lien avec la dernière séance, d'oralisation du texte, cette auto-évaluation guidée transite vers une lecture expressive. Pour ce moment de la séquence, il s'agit alors :
  • de partager des écrits produits ;
  • d'adapter sa façon de parler selon les critères de réussite présentés en classe (voix, gestuelle, ton expressifs) ;
  • de consolider les techniques de mise en voix des textes.
2. 
Déroulement de la séance 4, avec explication des choix opérés
Remarque
• On reproduira ici la partie du tableau représenté dans le document 1, de sorte à faciliter le travail des correcteurs : ce genre d'attention est particulièrement appréciée au CRPE ! De même, autant reprendre le découpage par « phase » suggéré par la représentation de la séquence, et qui semble pleinement ritualisé.

Objectifs spécifiques
Déroulement de la séance
Explication des choix opérés
4
Étude des procédés du conteur
  • Repérer par quels procédés le conteur retient l'attention de ses auditeurs
Mise en situation
Lecture expressive, par les élèves, de quelques passages marquants de l'extrait (par exemple le moment de l'échappée vers le cirque dans le chap. 1, l'événement dramatique du chap. 2, l'ensemble du chap. 3).
Cette approche permet d'exercer la lecture expressive des élèves et de les amener à prélever des éléments concrets de leur propre initiative. Elle favorise également les échanges entre pairs.
Phase de recherche collective
Repérage de quelques procédés par lesquels l'histoire 1) semble crédible, 2) s'organise comme un récit à suspens, avec un dénouement marquant (par exemple : la tonalité oralisante du récit et l'insertion de propos rapportés, les suspensions, la dramatisation de la scène, l'implication – interlocutive – des auditeurs, la transgression, le référent culturel du cirque, la crudité des faits, les quelques exagérations, ainsi que l'humour).
La phase en question constitue la pierre angulaire de la séance. Même si elle peut être préparée individuellement, pareille mutualisation engage une attitude corrective des élèves par la reformulation d'hypothèses et la désignation de procédés par les mots d'une analyse réflexive.
La régulation opérée par l'enseignant montrera de quelle manière on organise le propos et quelle est l'orthographe exacte des termes employés.
Institutionnalisation et mise en commun
À partir du relevé des procédés figurant au tableau, et reportés sur les supports élèves, ces derniers se mettent en binômes (par table) et rédigent une conclusion provisoire sur deux procédés au moins tout en les illustrant par des exemples repris de l'extrait.
Les conclusions/résumés exemplifiés sont mutualisés dans la classe.
Cette consolidation par l'écrit en binôme suscite des échanges entre pairs et conduit les élèves à améliorer une liste sous la forme de paragraphes construits.
Ils participent ainsi activement à l'élaboration de la trace d'une interprétation outillée.

3. 
Identification des obstacles éventuels à la lecture autonome du texte par les élèves et moyens d'anticiper ces difficultés (document 2)
Ces trois extraits de l'œuvre de J.-C. Mourlevat posent plusieurs types de difficultés, en particulier de compréhension et d'interprétation.
Concernant la compréhension, on note une accessibilité non garantie du lexique : les termes, par exemple, de « chapiteau », « minuscule mégot », « cirque ambulant », « poêle » « acrobates-voltigeurs » ou « gradins » ne font pas forcément partie des référents ni du répertoire de l'élève. De même, des expressions telles que « ça remonte à loin » ou « musique assourdissante » sont susceptibles de soulever des questions.
Cela concerne, outre les référents culturels du monde du cirque (chap. 1) ou de l'intérieur intime d'un temps passé (chap. 5), la part d'implicite de l'action rapportée dans le premier chapitre, où l'élève doit reconstituer la scène, reformulée dans le deuxième chapitre avec d'autres personnages, ainsi qu'une focalisation interne peu évidente à saisir au premier abord (« Je revois des gens très flous »). Implicite aussi s'avère le chapitre 5, du fait de son caractère résumé, succinct.
L'interprétation également peut poser difficulté, dans la mesure où l'élève doit aborder les chapitres comme les tergiversations du personnage, et donc comme des fictions narratives. Il est habituel chez J.-C. Mourlevat de livrer différentes versions d'une même histoire, à travers tant une diversité de points de vue qu'une pluralité de trames narratives. L'enjeu étant d'exercer une lecture critique d'un récit qui se renouvelle à chaque fois, avec des enchâssements dans l'histoire, il s'agit d'entrer dans une forme d'élucidation sous forme de recherche d'indices, laquelle nécessite plusieurs lectures superposées auxquelles les élèves ne sont pas forcément préparés.
D'un point de vue didactique, on peut anticiper le premier type de difficultés en faisant expliquer par les élèves (comme cela est prévu dans la séance 2) certaines expressions du texte. Pour ce qui a trait au lexique, on peut demander préalablement aux élèves de surligner les passages de l'extrait qui leur sont peu accessibles ou leur posent question. Ainsi mutualisés en groupe classe, les passages concernés font l'objet d'une appropriation progressive.
La pratique du résumé constituera un éventuel atout : en tâchant de relater ce qu'ils en ont compris, les élèves indiquent par là même leurs possibles difficultés 1) à identifier les indices de l'histoire (lieux, personnages, action), 2) à se représenter les choix du narrateur-conteur à la première personne, et 3) à discriminer les « deux époques » rapportées dans l'œuvre.
Le débat interprétatif est l'occasion de passer, enfin, par différentes étapes : celle d'un questionnement individuel, à l'aide d'une fiche ou d'un carnet de lecteur, et celle d'une confrontation collective des points de vue, en petits groupes, avant que n'intervienne une mise en commun. Celle-ci conduit le groupe classe à convenir d'une analyse partagée du passage et à pratiquer une approche conjointe, pour ainsi dire mutualisée, tant du genre (fantastique) du roman que de la tonalité (humoristique) des différentes versions qui sont données de l'événement.
4. 
Proposition d'étayages du travail d'écriture (séances 5 et 6)
Pour rappel, les séances 5 et 6 consistent dans un « projet d'écriture » en deux temps, où il s'agit :
  • de préparer le scénario de son histoire ;
  • d'écrire une histoire à la manière du vieil homme,
et ensuite :
  • de retravailler son écrit.
Concrètement, plusieurs formes d'étayage ont été anticipées par l'enseignant. Pour ce qui relève de la séance 5, il est prévu de rappeler les « caractéristiques » du conteur ; pour la séance 6, la grille exposant les critères de réussite constitue elle aussi un étayage, et l'enseignant a prévu de « pass[er parmi les élèves] pour les aider à relire leur récit et les guider dans la réécriture ».
De ce fait, voici quelques pistes de compléments que l'on pourrait apporter aux étayages déjà inscrits dans la démarche initiale de la séquence.
Lors de la séance 5, on devra sans doute rappeler les ingrédients narratifs du récit : outre les lieux et les personnages, le rappel des actions et de ce qu'est un « dénouement » s'impose en cas de difficultés. Il est même envisageable d'aider certains élèves à organiser leur tableau lors de la recherche individuelle. Enfin, la phase de mise en commun nécessite d'illustrer ce qui fait la « pertinence » des scénarios produits, dans la mesure où écrire « à la manière de » n'a rien d'évident. Donner d'autres exemples, inciter à reformuler, revenir sur les enjeux lexicaux et textuels de la consigne, sont autant d'étayages que nécessite ce type d'approche.
Lors de la séance 6, les premiers éléments d'aide consisteront à montrer à certains élèves comment manipuler la grille contenant les critères de réussite, quitte à les leur faire mémoriser ou restituer pas à pas dans un échange personnalisé. D'autres auront des difficultés, le cas échéant, à corriger leur écrit tout en l'améliorant : à ce moment-là, on reviendra sur les procédés d'écriture et les contraintes de la réécriture avec eux, tout en apportant éventuellement des amorces de phrases ou en invitant les élèves à surligner certains passages-clés, ou par exemple à utiliser des usuels.