La IVe République naît d'une guerre mondiale et disparaît dans une guerre coloniale (l'Algérie). Elle n'a tenu qu'une douzaine d'années (1946-1958). Pourquoi a-t-elle été si éphémère ? Quels sont ses succès ? Quel est son bilan ?
1. Une mise en place difficile
a) Quelle Constitution ?
• Au lendemain de la guerre, ayant rejeté par référendum le retour à la
iiie République, les Français doivent choisir une nouvelle Constitution. Trois projets s'opposent :
- le général de Gaulle souhaite un système présidentiel ;
- les communistes et les socialistes sont partisans d'une assemblée unique, dominante ;
- le MRP, Mouvement républicain populaire, parti centriste chrétien démocrate, prône le bicamérisme (deux assemblées).
• Les Français adoptent finalement, sans enthousiasme, un régime parlementaire (13 octobre 1946) : l'Assemblée nationale détient l'essentiel du pouvoir de décision et investit le président du Conseil.
Trois grands partis dominent alors la vie politique : le PCF (les communistes), la SFIO (les socialistes) et le MRP. On parle de tripartisme.
b) La troisième force
Les problèmes coloniaux en Indochine, le début de la guerre froide et les difficultés économiques aggravées par de mauvaises récoltes provoquent une rupture entre socialistes et communistes. Ces derniers doivent quitter le gouvernement. Grèves et manifestations se multiplient. Une nouvelle coalition alliant SFIO, MRP, radicaux et centristes se constitue pour diriger le pays ; se définissant par son hostilité aux communistes et aux gaullistes, elle est appelée la troisième force.
2. La reconstruction économique de la France
a) Les moyens de la reconstruction
• L'État joue un rôle prépondérant. Les nationalisations permettent à l'État de contrôler les postes clés de l'économie nationale (énergie, transports, banques, assurances, etc.).
• Une planification incitative établie par Jean Monnet oriente les investissements des entreprises selon les besoins du pays : priorité est donnée aux productions de charbon, d'acier, d'électricité et de ciment, à la construction de logements et aux exportations (premier plan quinquennal, 1947-1952).
• La création de la Sécurité sociale (1945) permet aux Français d'accéder plus facilement aux soins. En 1950, est adopté un salaire minimum garanti. Ces mesures ont également un impact sur la consommation des ménages et donc sur la croissance.
b) Les renforts extérieurs
• Le plan Marshall apporte à la France les capitaux dont elle a besoin pour se reconstruire. Elle reçoit plus de 20 % de l'aide américaine, soit 2 629 millions de dollars.
• À travers la CECA (Communauté européenne du charbon et de l'acier), la construction européenne ouvre à la France les marchés de ses partenaires. La coopération économique entre les Six stimule la production.
• Pour pallier la pénurie de main-d'œuvre, la France ouvre ses frontières à l'immigration. Des hommes, seuls le plus souvent, viennent d'Italie ou d'Espagne, puis du Portugal et du Maghreb.
c) Le « miracle économique »
• En 1950, la France est reconstruite. La planification a fait ses preuves, l'industrie se modernise, le pays entre dans une période de croissance sans précédent, les Trente Glorieuses. En 1952, Antoine Pinay assainit les finances de l'État et jugule l'inflation : le franc est stabilisé.
Le pays connaît le plein emploi et le calme social. Le pouvoir d'achat augmente de plus de 40 %.
Dans ce contexte favorable, la natalité repart : c'est le baby-boom.
• La reconstruction a jeté les bases de la France moderne. Cependant, le tableau n'est pas idyllique : certains secteurs (comme l'agriculture) progressent moins vite, les déséquilibres régionaux s'accentuent (retard du Sud-Ouest ou du Centre), artisans et petits commerçants ont du mal à faire face à la concurrence extérieure. En 1954, la pénurie persistante de logements mobilise l'abbé Pierre qui dénonce le trop grand nombre de sans-logis.
3. L'effondrement de la IVe République
a) L'instabilité ministérielle et le poujadisme
• L'instabilité ministérielle nuit à la bonne direction de l'État. 23 gouvernements se succèdent en 12 ans, soit un tous les six mois, en moyenne. Des désaccords au sein de la troisième force ainsi que l'opposition des communistes et du parti gaulliste compromettent la constitution d'une majorité gouvernementale stable.
• Les bouleversements liés à la modernisation provoquent l'hostilité d'une partie de la population : le poujadisme, mouvement de petits commerçants soutenu par l'extrême droite, réussit une percée électorale en 1956.
b) La crise coloniale
• Malgré les progrès économiques patents, les difficultés extérieures dominent : défaite militaire en Indochine (défaite de Dien Bien Phû le 7 mai 1954) et troubles en Afrique du Nord (Tunisie, Algérie).
• En 1956, sous la double pression américaine et soviétique, la France et la Grande-Bretagne doivent renoncer à leur intervention lors de la crise de Suez.
• La nomination de Pierre Pflimlin, favorable à l'indépendance algérienne, au poste de président du Conseil provoque une insurrection à Alger (1958). Sous la direction du général Massu, l'armée rallie le mouvement.
c) De Gaulle au pouvoir
Pour résoudre la crise, de Gaulle est nommé président du Conseil. Il obtient les pleins pouvoirs et le droit de réviser la Constitution. C'est la fin programmée de la IVe République.